mardi 8 mars 2022

Forêt de Fontainebleau, le Rocher Canon & les Longues Vallées (Christine le 08/03/2022)



Photos du jour.

C'est aujourd'hui (huit mars), la journée internationale des droits de la femme*,  et c'est donc une des femmes de notre groupe, Christine, qui pour sa toute première animation de rando BDV a choisi de nous guider dans le dédale des rochers du sentier Denecourt/Colinet n°12 au départ du parking du Rocher Canon dans le magnifique massif de la forêt de Fontainebleau.

Christine
, pour ce baptême d'organisatrice avisée, a sélectionné, pour notre plus grand plaisir, un bel après-midi baigné de soleil et d'une température quasi printanière qui va nous enchanter tout au long de cette boucle sportive de quelques six kilomètres.

* Cette journée du 8 mars fait l'objet 🔰d'un article dans la rubrique 'On en Parle'.

Photo D. Armanini


Le Rocher Canon, un spot de bloc à Bleau.

Photo JPL

Nous marquons une première pause pour admirer le célèbre 'chêne bonsaï', un des arbres vedettes du massif qui compte environ 700 arbres remarquables que l'association des'Amis de la Forêt de Fontainebleau' se charge de recenser, de mettre en valeur et de signaler par un petit cercle bleu peint sur les troncs. Cette star qu'est le chêne pédonculé du Rocher Canon a inspiré quelques vers à Alphonse de Lamartine :
"Voilà ce chêne solitaire
Dont le rocher s'est couronné
Parlez à ce tronc séculaire
Demandez comment il est né
"
Le chêne trône, en effet, au sommet d'un imposant bloc de grès brut haut de plus de deux mètres semblant puiser dans la roche elle-même le secret de sa force vitale. Son pivot racinaire enlace la pierre, tel un tentacule, pour aller puiser en contrebas dans la terre nourricière.

Mais le Rocher Canon, c'est surtout un formidable chaos de blocs de grès entre lesquels nous allons nous contorsionner avec plus ou moins d'élégance et de souplesse sur plusieurs centaines de mètres suivant un dénivelé où alternent des montées et des descentes relativement aisées, croisant, ça et là, des groupes de jeunes gens ayant installé leur matériel pour la pratique de la varape.
Les particularités géologiques et la proximité de Paris du massif de Fontainebleau lui confèrent une place de choix dans l'histoire de l'escalade et de l'alpinisme en France. Le Rocher Canon est un site d'escalade de réputation internationale. Depuis les années 1980, le "bloc" (escalade sur rochers de faible hauteur) se développe comme activité sportive autonome et non plus comme subalterne à l'alpinisme ou à la falaise. L'escalade entre au programme des 🔰Jeux Olympiques de 2020 (Tokyo-2021) et le 'Bloc' est avec le 'Speed Climbing' et le 'Lead Climbing' une des trois disciplines officielles d'escalade que les concurrents ont à disputer. On vient de partout dans le monde pour pratiquer le "bloc" à Fontainebleau.
Dans le jargon des pratiquants, la Forêt de Fontainebleau est nommée "Bleau🔰". On pratique donc le bloc à Bleau. Mais cela n'est pas sans conséquences sur l'environnement. Ce très beau site propose nombre d'arbres remarquables marqués du 🔰petit cercle bleu . Outre le célèbre 'chêne bonsaï', on y trouve de très beaux spécimens de hêtres tortueux, de très beaux bouleaux et quelques cèdres rescapés...

Progressivement, le Rocher Canon est devenu un milieu artificialisé par des installations comme ce long platelage en escalier que nous empruntons pour rejoindre le cœur du site, artificialisé aussi par les équipements anti-érosion, les parcs de stationnements et les panneaux d'information. L'hyper-fréquentation entraîne un damage excessif des sols, le décapage des couches superficielles, le déracinement des arbustes, la mise à nu des racines des plus gros arbres. Les pérégrinations nocturnes de quelques jeunes des environs qui y font du feu, des tags et y cassent leur bouteilles de bière ajoutent au problème de fond. Bref, le Canon est l'exemple d'un site péri-urbain d'un intérêt remarquable et qui, menacé, nécessite la vigilance de tous : grimpeurs, promeneurs, visiteurs...Les grimpeurs et les randonneurs font leur part d'actions de sauvegarde ; c'est eux qui ont effacé les tags signalés, c'est eux aussi qui régulièrement vont ramasser les déchets.

Les sentiers Denecourt.

Photo D. Armanini

Nous allons suivre le sentier Denecourt n°12 sur la plus grande partie de notre circuit du jour et plus précisément le 'Dénécourt/Colinet n°12 Ouest' (sa partie située à l'ouest de la D142). Ce sentier n°12 fut crée en 1950 par le Syndicat d'Initiative de Bois Le Roi.  Il n'appartient donc pas aux sentiers originellement créés par Denecourt en personne. Mais, l'empreinte de cet homme prestigieux sur la Forêt de Fontainebleau est si considérable que tous les sentiers créés ultérieurement à son œuvre conservent le nom du génial créateur. Nous pouvons observer que le balisage à la peinture bleue du sentier a été très récemment rafraîchi. Il faut en remercier l'association 'les Amis de la Forêt de Fontainebleau' qui forme des équipes pour l'entretien des sentiers et la mise à jour de leur balisage.
🔰Claude François Denecourt (1788-1875), concepteur des sentiers bleus de la forêt de Fontainebleau, a consacré l'essentiel de sa vie à faire connaître et contribuer à créer, souvent de toutes pièces, les richesses de la forêt de Fontainebleau. Combattant de l'Armée napoléonienne, il est nommé concierge d’une caserne de Fontainebleau en 1832, avant d’être révoqué en raison de ses idées républicaines. À 44 ans, il découvre les beaux paysages de la forêt qui lui apportent beaucoup de réconfort. Il décide alors de consacrer tout son temps et une partie de ses économies à faire connaître ce lieu aux touristes. Autodidacte, il publie ses premiers guides très rapidement : les guides Denecourt. Chaque édition était accompagnée d’une carte réalisée selon ses instructions. La carte permettait de repérer les différentes visites proposées dans le guide. C’est son approche pratique et concrète de la visite en forêt qui fit le succès considérable des "guides Denecourt". À partir de 1842, Denecourt ne se contente pas d’indiquer les promenades, mais il commence à tracer lui-même les chemins en forêt, souvent avec l’aide des carriers et autres tailleurs de pavés. À sa mort, 150 km de sentiers sont ainsi tracés et balisés au moyen de flèches bleues. Il fit également aménager des fontaines, des grottes et édifier la tour qui porte aujourd'hui son nom. Il baptisa enfin les lieux les plus remarquables : 600 arbres, 700 rochers, sites et points de vue. Ces noms, souvent empruntés à la mythologie, à l’histoire ou à la littérature, étaient l’occasion pour lui de raconter les légendes liées au lieu – légendes que souvent il inventait lui-même. Les plus grands écrivains (Lamartine, Hugo, Sand, Musset, Baudelaire…) lui rendirent hommage à travers un recueil de textes où il fut nommé le "Sylvain de la forêt de Fontainebleau" par Théophile Gautier. De nos jours, ces sentiers bleus sont baptisés "Denecourt/Colinet". Charles Colinet (1839-1905), son disciple, fut l'infatigable continuateur de l’œuvre du maître. Claude François Denecourt est considéré comme un des pionniers de la randonnée pédestre et des chemins de randonnée modernes.

Les Longues Vallées.

Photo D. Armanini

Notre déambulation dans le secteur du Rocher Canon tire à sa fin. Nous avons noté l'implantation du 🔰houx en grande progression, semble-t-il dans le chaos rocheux. "Est-ce au détriment d'autres essences?" se demande-t-on. (Renseignement pris, il apparaît que le houx n'est pas du tout une essence invasive ; ses baies permettent en particulier aux oiseaux de se nourrir pendant l'hiver. L'unique problème que pose le houx à l'ONF est la lutte que l'office doit mener contre la cueillette illégale pratiquée par des revendeurs peu scrupuleux dès novembre)Nous nous arrêtons un instant, pour réparer une chaussure éventrée, au niveau de la 'Route de la Femme' (en ce huit mars, on ne pouvait pas mieux se trouver). Puis nous nous engageons sur la pente assez raide du petit chemin qui rejoint le 'Carrefour de Bellevue' pour entrer sur la crête du massif des Longues Vallées. Nous poursuivons sur la 'Route de la Défense'. Ici, le paysage est totalement différent de celui du chaos du Rocher Canon, le chemin est rectiligne dominant le val de Seine qu'on peut deviner dans le lointain, plus aucun bloc de grès ne vient perturber notre cheminement, 

La pinède a visiblement supplantée la hêtraie. Nous remarquons que le sol n’est pas le même, nous marchons sur des cailloux de calcaire. C’est du calcaire de Beauce. Nous sommes plus haut que les sables du stampien et le calcaire qui s’est déposé correspond à des couches géologiques post-stampiennes. Nous rejoignons la 'Route du Petit Vallon' que nous descendons jusqu'au 'Carrefour des Longues Vallées'. Ici la forêt est traversée par le D142 où un trafic routier très dense s'écoule vers Melun. Nous traversons prudemment par petits groupes pour aller admirer un des représentants les plus emblématiques des habitants de la forêt, le 'Bouquet des Longues Vallées'. C'est une impressionnante 🔰cépée de chêne sessile (ou chêne rouvre). Nous connaissions les 'Sept Frères' un chêne en cépée que nous avions observé lors d'une précédente rando dans les environs de la 'Table du Roi'. Le 'Bouquet des Longues Vallées', lui, compte huit troncs s'élevant magnifiquement dans une géométrie parfaite. Le pied du tronc commun aux huit fûts de ce chêne majestueux a une circonférence de 7,30 mètres.
Christine et Philippe parviennent à se hisser 🔰au coeur de la cépée pour profiter au mieux d'une vue centrale sur l'élévation des huit troncs. Nous applaudissons la performance. Nous rebroussons chemin, traversons à nouveau la D142 puis prenons la direction du nord. Nous cheminons maintenant à nouveau dans un dédale chaotique de rochers gréseux, on se contorsionne, on se faufile et on se hisse dans ce cadre tout à fait exceptionnel d'une des plus belles forêts de France. Nous rencontrons à nouveau quelques jeunes adeptes de bloc. Une jeune américaine nous explique être venue ici depuis l'Utah. Nous retrouvons le platelage en escalier qui va nous mener jusqu'à la plaine du parking où nous ne manquons pas de remercier Christine pour la très bonne organisation de sa toute première animation de rando et pour l'attention bienveillante qu'elle nous a portée tout au long quant aux éventuelles difficultés que nous aurions pu rencontrer sur ce parcours exigeant.

Photo D. Armanini


Photo D. Armanini

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