samedi 13 mai 2023

Amiens, les Hortillonnages (Pilou le 13/05/2023)

Photos du jour.
Le délicat Bon Dieu des randonneurs a, aujourd'hui, affectueusement bichonné les 36 adhérents BDV qui pourront se régaler d'une belle journée particulièrement ensoleillée pour la visite du centre-ville d'Amiens et pour la découverte en barque des célèbres Hortillonages de la capitale picarde. Dans ce mois de mai plutôt gris, pluvieux et froid, dans l'actuelle instabilité de la masse d'air que nous décrit la météo, ce samedi 13 mai apparaît comme une pause aussi réjouissante qu'inespérée. Nous avions pour consigne de croiser les doigts pour qu'il en soit ainsi, cet effort n'aura pas été vain.
Sarah, la pilote de notre car, remarquablement habile pour manœuvrer son engin, enclenche la mécanique et nous voilà en route vers la Somme via l'autoroute A16. À quelques kilomètres de notre point d'arrivée, Sarah fait un arrêt autorisant nos vessies à se soulager. Nous sommes ici  sur l'Aire de la "Vallée de La Selle"😊... Marie a préparé 🔰un petit déjeuner café/croissants qu'elle a agrémenté d'un excellent gâteau quatre-quarts de sa confection.  Nous ne tardons pas à nous remettre en route, il est à peine 10h00 quand nous arrivons sur le parking des Hortillonnages à partir duquel nous partons pour  un circuit découverte de 5,5 kilomètres dans la ville.

La Balade en Ville.
Ici, la 🔰Somme alimente un réseau complexe d'innombrables petits chenaux, canaux, îlots, plans d'eau. Nous longeons le petit bras de la Somme qui traverse le Parc Saint-Pierre.  Conçu en 1993 par la paysagiste Jacqueline Osty, c'est un espace vert de 22 ha, en bordure du canal de la Somme que nous rejoignons au niveau de la Passerelle Baraban. Nous enjambons le canal de la Somme et rejoignons le Boulevard du Cange que nous descendons vers le Centre-Ville.
Nous voici au niveau des très beaux bâtiments qui abritent le 🔰Sport Nautique D'Amiens (école d’Aviron) Ce club d'aviron d'Amiens, réputé et récompensé par de nombreuses médailles, est l'une des plus anciennes associations de Picardie (1866). La passerelle Samarobriva qui permettait de traverser le canal au niveau du club d'aviron a disparu. Un panneau indique  que sa restauration est en cours.
Nous traversons la Somme sur le Pont du Cange. C'est jour de marché. Une grande animation règne sur le Quai.

On aperçoit la 🔰flèche de la cathédrale qui s'élance en toute légèreté malgré ses 70 tonnes sur 47 mètres de haut  au dessus de la nef à la croisée du transept. Elle culmine ainsi à près de 113 mètres. C'est une flèche en bois de chêne recouverte de plomb. Eugène Viollet-le-Duc, chargé de sa restauration, s’en inspira pour construire la flèche de Notre-Dame de Paris au XIXe siècle. 

Nous nous dirigeons vers la Cathédrale. Nous abordons l'immense vaisseau gothique du côté de son chevet à l'est, place Saint Michel. Là, s'élève la 🔰Statue de Pierre l'Ermite C'est un religieux originaire d'Amiens, connu pour avoir prêché la première croisade en 1095.  Sur le socle, on peut lire « Dieu le veut », le redoutable cri de guerre des croisés.
Nous longeons le flanc méridional de la Cathédrale jusqu'au transept dont le bras sud s'ouvre sur le 🔰portail Saint-Honoré. On l'appelle aussi "Portail de la Vierge Dorée" du nom de la sculpture du trumeau du portail qui représente une Vierge à l'Enfant. Son nom lui vient de la polychromie dorée dont les traces sont encore visibles de nos jours. Depuis 1980, c'est un moulage recouvert d'une patine dorée qui remplace 🔰l'original replacée à l'intérieur de la cathédrale.
Nous quittons momentanément l'espace de la cathédrale pour nous diriger vers le Kiosque et la Maison du Sagittaire. Nous traversons le petit square fleuri aménagé face au Palais de Justice pour observer la belle façade renaissance de La Maison du Sagittaire qui tire son nom des 🔰deux sagittaires sculptés au-dessus des deux arcades. Cette maison qui se trouvait autrefois rue des Vergeaux fut entièrement détruite en mai 1940. Seule sa façade subsista miraculeusement. Longtemps conservée, elle fut réédifiée pièce par pièce,  en janvier 1960, ici  à côté de la Tour du Logis du Roy.
Nous rejoignons la très vivante et très commerciale Rue des Trois Cailloux entièrement piétonnière. Nous arrivons devant 🔰l'Hôtel de Ville d'Amiens. C'est est un très beau bâtiment des XVIIIe et XIXe siècles construit en U. Dans la cour d’honneur, le 🔰buste en bronze de Jules Verne a été inauguré en juin 2022. Aimée de Viane, la fiancée de Jules Verne habitait à Amiens. Leurs noces furent célébrer ici et le jeune couple ne tarda pas à s'installer dans le sud de la ville dans une belle maison qui abrite aujourd'hui le Musée Jules Verne. Les références à Jules Verne sont nombreuses à Amiens (La Maison à la Tour, le Cirque, l'Université, etc...)
Nous couvrons la courte distance qui sépare la Mairie de la place au Fil où s'élève les  52 mètres du 🔰Beffroi. Il est est constitué d'une base du XVe siècle  en pierre de taille blanche surmontée d'un clocher en pierre édifiée à partir de 1749 avec des volutes de style baroque à sa base, et d'un dôme recouvert d'ardoises puis d'une flèche et d'une girouette arborant une 🔰renommée avec sa trompette. Une énorme cloche de 11 tonnes, baptisée « Marie-Firmine », fut installée à l'intérieur. En 1940, la ville d'Amiens subit un violent bombardement.  La lourde cloche  se brise en s'écrasant sur le sol.  Le monument a été restauré en 1989.

Nous voilà de retour sur le site de la cathédrale, place Notre Dame, devant la sublimissime façade occidentale avec ses trois portails, sa galerie des rois, sa rosace flamboyante et ses deux tours asymétriques (La tour nord avec 69 mètres dépasse de 47mètres la tour sud). Certains, parmi nous, se remémorent d'une précédente rando organisée à Amiens, à l'occasion de Marchés de Noël, pendant laquelle, nous avions eu le privilège d'assister au spectacle laser qui redonne à la façade de la cathédrale tout son lustre d'antan en respectant la 🔰polychromie initiale de chacun des innombrables détails ornementaux de ce joyaux gothique.  Notre Dame d'Amiens est la plus vaste cathédrale de France en volume. Seule la Cathédrale Saint-Pierre de Beauvais la dépasse de 5 mètres en hauteur. 
Nous pénétrons dans l'immense nef. Il faudrait consacrer un temps long sous la conduite d'un guide expérimenté pour découvrir toute l'immense richesse architecturale et spirituelle des lieux. L'agenda du jour nous oblige à accélérer le pas et nous devons quittons l'endroit, frustrés de n'avoir pas pu y consacrer toute l'attention nécessaire mais convaincus de l'impératif d'y revenir pour en approfondir notre perception.

(En attendant, je vous conseille la lecture du remarquable article de Wikipédia consacré à Notre Dame d'Amiens que vous trouverez en suivant ce lien.)

Nous entrons maintenant dans le petit Parc de l'Evêché : C’est un jardin public qui borde le côté nord de la cathédrale. Un escalier descend vers la Rue du Hocquet que nous suivons jusqu'à la Venelle Lafleur qui circule entre la Bibliothèque Universitaire et l'UFR de droit et de Science Politique. Amiens, ville universitaire, nommée capitale européenne de la jeunesse en 2020, accueille aujourd’hui 32 000 étudiants qui disposent d’une offre de formation très large.
Nous nous dirigeons maintenant vers 🔰l'Église Saint-Leu. C'est, après la cathédrale dont elle est toute proche, la plus ancienne église d'Amiens. Elle est de style gothique flamboyant. Elle a été construite en craie sur un soubassement en grès. Au pied de l'église se trouve une 🔰sculpture atypique d'art contemporain curieusement placée là depuis 1961.
Nous contournons l'église pour entrer dans le quartier Saint-Leu, ‘la petite Venise du Nord’. Ce vieux quartier est le lieu incontournable pour boire un verre en terrasse et se retrouver autour d’une bonne table. Nous longeons les canaux. La passerelle des Granges nous permet de rejoindre le Pont de la Dodane où nous marquons un petit d'arrêt pour évoquer la légende des amoureux d'Amiens. Trois célèbres  personnages en sont les protagonistes : 🔰La femme à la robe verte et 🔰l'homme à la chemise rouge (qu'on aperçoit tous deux de l'autre côté du pont accrochés sur des façades de restaurant de la Place du Don ) et 🔰l'homme sur la bouée qui lui flotte sur les eaux de la Somme au pied du pont et qui fait face aux deux autres personnages. La légende propose deux versions d'un dépit amoureux :  dans la première thèse, l'homme sur la bouée, amant malheureux se serait jeté dans la Somme sous les yeux de la femme aimée qui refusait de quitter son mari. La seconde version établit que le mari trahi, au comble du désespoir, aurait décidé de se noyer sous le regard des deux amants. (Où est la vérité ? On dit que seuls les cocus aguerris peuvent trancher la question.)


Notre restaurant "Le Port Saint Leu" est à deux pas sur le Quai Bélu. Nous y sommes très agréablement accueillis. 🔰Sarah est venue partager notre repas. Élodie, notre serveuse, souriante, efficace fait preuve de la plus grande attention aux sollicitations de chacun. Outre la qualité du repas, nous saluerons unanimement le service et la gentillesse d'Élodie. Nous avalons le café. il est temps de rejoindre les Hortillonnages où trois barques nous attendent pour la visite de ce site si particulier.


Les Hortillonnages.
Nous nous formons en trois groupes pour embarquer sur trois barques. Chaque barque dispose de quatre bancs de trois places. Le guide chargé de piloter la barque du premier groupe s'appelle Théo.  Nous le questionnons sur l'origine de son activité. Il évoque le bouche à oreilles qui lui a permis de décrocher ce poste. Il était jeune étudiant en géographie, s'intéressait à la région picarde et à son économie. C'est ainsi qu'il découvrit l'histoire de cette vaste étendue de terres maraîchères à l'est d' Amiens, puis le hasard des recherches et des rencontres l'ont amené sur le terrain et finalement à ce poste de guide embarqué. Nos barques sont des barques à cornet charpentées d'après un modèle proche des barques qu'utilisaient les hortillons jadis. Elles sont propulsées par un moteur électrique silencieux et respectueux de l'environnement.  Le site des hortillonnages résulte de l'aménagement par l'homme du milieu naturel marécageux très probablement au Moyen Âge, à la suite des équipements (moulins, barrages) de la Somme. Les hortillonnages, alimentés par les eaux du fleuve, sont formés d'une multitude d'îles alluvionnaires, les "aires" entourées de 65 kilomètres de voies d'eau, les "rieux" (nom des canaux en picard). 
Les hortillonnages, sous leur forme actuelle, sont cultivés depuis environ sept cents ans. Il faut noter que l'extraction de la tourbe utilisée comme combustible a contribué au façonnage du site tel qu'on le connait. Aujourd'hui, à cause de l'extension urbaine, il ne reste plus que trois cents hectares sur les dix mille hectares d'origine. Si 950 personnes avaient une activité d'hortillons en 1906, il ne reste aujourd'hui que quatre exploitations en activité. Les hortillonnages eurent un rôle majeur pour nourrir les Amiénois jusqu'au XXe siècle. Le marché sur l'eau existe toujours, place Parmentier, mais les légumes ne s'entassent plus dans les barques et sont désormais acheminés en camionnette. La majeure partie des hortillonnages a été transformée en jardins d'agrément par des particuliers, voire en résidences secondaires.
Les hortillonnages restent un espace d'une grande richesse écologique. On rencontre de nombreuses espèces d'arbres et d'arbustes, tels que des saules, des aulnes glutineux, de l'aubépine, des sureaux noirs, des cornouillers sanguins, des viornes obiers, des frênes, des peupliers, etc. Le site abonde de variétés de plantes sauvages ; on y trouve de la consoude, de la lèche des rives, de la lèche paniculée, du rumex, de la salicaire commune, du solidage tardif (ou verge d'or), de la cirse faux-épinard, de la balsamine de l'Himalaya, de l'eupatoire à feuille de chanvre, de l'épilobe à petites fleurs, du houblon, ou encore de la scrofulaire à oreillette.
Les oiseaux sont nombreux sur les sites, sédentaires ou migrateurs. On y trouve des passereaux (rouge-gorge, fauvette, roitelet, troglodyte, rossignol, hirondelle, pic-vert, mésange, merle, grive, bouvreuil, chardonneret), des bécasses, des bécassines, des canards (colvert et chipeau), des hérons, grèbes huppés, martins-pêcheurs, blairies (ou foulques), poules d'eau, pluviers dorés, des oiseaux nocturnes (chouettes, hiboux petits ducs, butor) qui y nichent, s'y reproduisent et s'y nourrissent.
Théo aborde l'intéressant sujet de la sexualité chez le Colvert. Un article traitant de ce thème est disponible dans la section 'On en Parle' du Blog. (Cliquez ici.)
Les poissons abondent : tanches, chevesnes, anguilles et brochets.
Nous avons la surprise d'apercevoir nageant devant notre barque, un rat musqué, une espèce américaine qui a envahi le vieux continent et qui provoque des dégâts considérables sur les berges qu'il faut consolider constamment. Il ne faut pas confondre le rat musqué avec un autre envahisseur destructeur de berges : le ragondin beaucoup plus gros. Un article portant sur le ragondin est disponible dans la section 'On en Parle' du Blog. (Cliquez ici.)
Le site accueille environ 100 000 visiteurs par an, dont 30 % d'étrangers (Anglais, Allemands, Belges, Néerlandais, etc.).
Nous voilà déjà de retour à l'embarcadère. Sarah nous attend dans son car garé tout près. Elle a choisi l'autoroute A1 pour le retour à Varennes-Jarcy. La circulation sera plutôt fluide jusqu'à Brie-Comte-Robert où quelques embouteillages nous attendent sur les derniers kilomètres du voyage. Il est 18h30 quand nous retrouvons le parking du Gymnase à Varennes tous ravis de l'excellente journée passée sous un soleil généreux en ces bonnes terres de Picardie
Une fois par an, en Juin,  le marché sur l'eau se déroule comme autrefois. Les hortillons, en costume traditionnel, descendent la Somme dans les barques à cornet chargées de légumes, de fruits rouges et de fleurs jusqu'à la place Parmentier.