C'est sur les terres agicoles briardes entre Favières et Tournan-en Brie qu'a décidé Aimé de nous conduire aujourd'hui, sur une distance de plus de 11 kilomètres. L'été qui a fait sa tardive apparition officielle la semaine dernière, où nous avons connu des températures élevées, semble aujourd'hui déjà finissant. Le ciel charrie une épaisse couche de nuages et la température n'excède pas vingt degrés. Si pour l'estivant de base, en quête d'un soleil brûlant suceptible d'apporter à sa peau un hâle du plus bel effet, cette météo est une sevitude fâcheuse, elle apporte en revanche, pour le randonneur, un appréciable ménagement de l'effort à consentir. Et c'est tout emplis d'une belle énergie que nous nous élançons sur le plateau briard.
Photo D.Armanini
La Marsange
Nous nous sommes garés Rue du Marais à Favières. La petite rue longe le cours de la Marsange. Un petite passerelle nous permet de franchir le cours d'eau tout de suite avant de descendre plein sud, à travers champs et bosquets, vers Tournan-en-Brie où d'ailleurs nous allons retrouver la rivière, rue de l'Abreuvoir, au coeur de la ville. Nous sommes entrés dans la ville par le chemin des Prés Bataille qui longe le joli petit étang du Moulin à Vent alimenté par le Ru des Boissières qui se jette dans la Marsange à l'abreuvoir précisément.
Photo D.Armanini
La Marsange à Tournan-en-Brie. Source Wikimedia Commons. |
Nous connaissons bien la Marsange à BDV, grâce à nos randos en amont de Favières, à Neufmoutiers et Villeneuve-le Comte et celles en aval de Tournan-en-Brie, à Presles, Liverdy ou à Ozoir le Voulgis où elle se jette dans l'Yerres. Cette petite rivière de 30 kilomètres prend sa source sur la commune de Coutevroult, où elle n'est encore qu'un cours d'eau intermittent au débit insignifiant à l'instar des rus de la Brie. Ce n'est qu'à partir de Villeneuve-le-Comte qu'elle devient pérenne. Elle est déjà un large ruisseau à Favières et devient une petite rivière à Tournan où elle traverse la ville. Elle alimente l'étang de Presles-en-Brie puis à partir de là elle traverse des territoires très infitrants où elle perd du volume et elle n'est plus qu'un gros ruisseau quand elle se jette dans l'Yerres.
Présence de la famille Rothschild.
Nous traversons donc la Marsange à Tournan-en-Brie avant d'emprunter la belle Allée d'Armainvilliers jusqu'aux grilles de l'immmense Domaine d'Armainvilliers toujours réputé comme celui des Rothschild bien que la famille l'ait quitté depuis près de quarante ans. Ainsi, l'histoire des trois communes de Favières, Tournan-en-Brie et Gretz-Armainvilliers est profondément marqué par ce qu'y fut la présence des Rothschild.
Jusqu'en 1961 la famille Guy et Edmond de Rothschild possédait, au delà du domaine d'Armanvilliers, 2401 hectares sur la commune de Favières-en-Brie qui, au total, n'en compte que 2826 hectares soit une emprise des Rothschild sur 85% du territoire communal. Au cours de la seconde moitié du vingtième siècle, la famille a vendu son patrimoine sur Favières à l'ONF, au district de Paris, à France Forêts et au roi du Maroc.
Photo D.Armanini |
Les plans dessinés par l'architecte parisien Michel Pinseau permettent de mesurer l'ampleur des travaux, estimés en 1980 à plus de 200 millions de francs. Le sous-sol, desservi par un tunnel de livraison baptisé " le métro ", débouche sur les communs : aux batteries de cuisine européennes et marocaines succèdent les légumeries, l'épicerie froide et la glacerie. Au rez-de-chaussée, les traditionnelles salle à manger, salle de chasse, les salons, antichambres et studios côtoient un ensemble médicalisé dont bien des villages de la région se contenteraient : salon, bureau du médecin, salle d'examens, pharmacie et analyses, bureau du dentiste et cabinet dentaire. La liste interminable des pièces (pas moins de deux cents) se poursuit à l'étage, avec notamment le salon et les jardins d'hiver de Sa Majesté.
L'environnement du manoir est à l'avenant, puisque cette réserve, placée sous le contrôle de l'Office de la chasse, abrite également une entreprise horticole, des haras, un chenil et une kyrielle de maisons de gardiens et de régisseurs. Cependant, rares sont encore aujourd'hui ceux qui ont pu approcher le château ou même le lac, le domaine étant défini comme une proprièté stictement privée.
Le fils de Hassan II, devenu Mohammed VI roi du Maroc, a revendu le domaine en 2008. L'heureux acquéreur acquéreur serait, d'après Wikipédia, Esam Janahi, figure de proue de la finance islamique. (Il est cependant très difficile de trouver d'autres sources d'information sur cette vente). La finance islamique a émergé dans les années 1970 dans la région du Golfe essentiellement mais aussi au Moyen-Orient. Considérant sa croissance exceptionnelle et l’engouement que suscite cette branche de la finance, le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale se sont prestement emparés du sujet et affichent leur volonté d'asseoir la finance islamique comme un secteur à part entière du système financier mondial.
Photo D.Armanini |
Remontant vers la commune de Favières suivant les limites du Domaine d'Armainvilliers, nous empruntons d'abord
une
belle allée ombragée bordée de conifères
. Puis, un peu plus loin, il va se trouver que nous allons brièvement pénétrer, par erreur et en toute innocence, dans un espace agricole privé. Cet espace contigu au Domaine d'Armainvilliers n'en fait cependant plus partie. On peut ainsi y découvrir, une de ces anciennes magnifiques maisons de garde du domaine, aujourd'hui inhabitée. Un portail en fer forgé, quelque peu rongé par la rouille et les années marque ce qui devait être une des anciennes limites du domaine du château d'Armainvilliers. Un peu plus loin apparaît la splendide ferme du Puits-Carré bâtie (à la différence de toutes les autres fermes de la région) dans ce style anglo-normand si prisé par Edmond de Rothschild. Elle est évidemment une de ces fermes bâties par le Baron à la fin du XIXème siècle. On a vu plus haut que la famille Rothschild avait revendu 85% du territoire de la commune de Favières à différents organismes ou personnalités et c'est dans l'une de ces terres que nous sommes inopinément entrés. Un gardien est venu nous signaler notre impair. Nous lui avons présenté nos plus plates excuses et avons rapidement rejoint le GR14 dûment balisé pour poursuivre notre route en toute légitimité.Et si on parlait blé...
Les moissons bien que très tardives cette année sont maintenant achevées et nous avons tout loisir d'observer l'immensité des surfaces moissonnées et de constater de visu la prééminence de la culture du blé sur toutes les autres. La Brie est après la Beauce le second grenier de la France... Vu d'ici, entre Favières et Tournan, c'est une évidence. Nous prélevons quelques épis miraculeusement échappés au puissant cisaillement de la moisse-batte locale. Ginette signale avec raison " Ça, c'est de l'orge.. C'est pas du blé.." Effectivement, c'est de l'orge avec son épi porteur de longues barbes si caractéristiques. Ginette a parfaitement raison sur ce point, cependant Ginette n'a pas raison d'opposer 'orge' et 'blé' ce que nous faisons tous, il faut bien le reconnaître.
En effet l'orge c'est du blé. Le terme blé est générique et il désigne de nombreuses variétés différentes comme l'orge et le froment. Ce que nous opposons à l'orge est, en fait, le froment, un blé tendre qui permet d'obtenir une farine panifiable. Je reproduis ci-dessous une partie de l'article que j'avais publié pour illustrer une rando à Presles (une rando d'Aimé d'ailleurs qui est notre spécialiste de la Brie agricole).
Le blé est un terme générique désignant plusieurs espèces de céréales à épi et à paille dont :
Le froment (blé tendre)
Le froment (blé tendre)
Le froment (que nous appelons généralement blé) est un blé tendre. Son grain permet d'obtenir une farine panifiable de grande qualité.
Le blé tendre est, de très loin, la céréale la plus cultivée en France, particulièrement en Brie et en Beauce.
L'orge commune : aussi appelée "herbe à chat"
Curiosité orthographique, 'orge' est un nom féminin, sauf dans les expressions "orge émondé" et "orge perlé". Ses épis à longues barbes sont aisément identifiables. Il en existe cependant de très nombreuses espèces (orge d'hiver, orge de printemps, orge brassicole...)
L' escourgeon est une orge d'hiver à 6 rangs de grains.
L' escourgeon est une orge d'hiver à 6 rangs de grains.
L'orge est une excellente fourragère. Pour l'alimentation humaine, les grains doivent être abrasés (orge perlé) ou débarrassés de leur glume (orge émondé). L'orge est également utilisée en malterie dans la production de bière (orge brassicole).
L'épeautre. (aussi appelée "blé des gaulois") Panifiable, elle a d'excellentes qualités alimentaires et est considérée comme plus intéressante pour la santé que le froment.. Elle est cependant encore peu cultivée car son rendement est moins élevé. La glume qui adhère à son grain est particulièrement coriace, ce qui rend les opérations de décorticage assez complexes, d'où son prix élevé.
Le blé dur : Il en existe plus de 150 espèces cultivées. On le cultive surtout dans le sud du pays. C'est un blé non panifiable du fait de la dureté de son grain. On en tire une excellente semoule riche en protéine pour la production de pâtes alimentaires, de couscous, de boulghour.
Le seigle. Sa culture est de nos jours marginale. Sa farine est recherchée pour son intérêt diététique, mais sa consistance molle la rend difficile à manipuler en boulangerie.
L'avoine fait aussi partie des céréales à paille. On la cultive essentiellement pour son grand intérêt fourrager. Mais depuis quelques années son utilisation dans l'alimentation humaine se développe du fait de ses qualités démontrées pour la santé.
Photo JPL |
Nous longeons maintenant un champ de maïs juste avant de rentrer dans le village de Favières. Le maïs est aussi une céréale mais n'appartient pas à la famille des blés (céréales à paille). Cette localisation du maïs près du village ne doit rien au hasard. En effet, les terres ici sont plus humides à l'approche de la vallée de la Marsange. La culture du maïs est souvent stigmatisée systématiquement associée à l’irrigation et donc à un usage massif d’eau. Claude indique qu'il convient de nuancer le propos. En fait, le maïs consomme moins d'eau que le blé : pour produire 1kg de maïs on a seulement besoin de 454 litres d’eau et 238 litres pour du maïs fourrage. Ce qui fait du maïs l’une des plantes les plus économes en eau. À comparer avec les 590 litres d’eau indispensables pour le blé, les 900 litres pour le soja et entre 1600 litres et 5000 litres d’eau pour le riz.
Cependant, la mauvaise réputation de la culture du maïs n'est pas totalement infondée. L'eau que réclame la culture du blé est généralement abondante. Elle est présente dans les terres à la fin de l'hiver et y persiste au printemps ce qui correspond à la période de croissance du blé. Tandis que le maïs planté beaucoup plus tard, même si il est moins gourmand, a besoin de l'eau quand elle a cessé d'êrte abondante. D'où le nécessité d'apporter le précieux liquide par divers systèmes d'irrigation particulièrement mal vus en ces temps de changement climatique où les pénuries menacent.
Nous voilà de retour sur les bords de la Marsange où nous pouvons retrouver notre parking. Merci à Aimé pour nous avoir permis de découvrir aujourd'hui des lieux très intéressants habituellement tenus à l'écart du public.
Carte de notre circuit :
Le plan imprimable et le fichier GPX de ce circuit sont accessibles dans l'onglet "GPX&PDF". (Mot de passe nécessaire)
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