mardi 18 juillet 2023

Les Îles de Créteil (Pilou le 18/07/2023)

Photo J. Fillis

Photos du jour.

L'été 2023 est décidément particulièrement chaud. La rando de la semaine passée avait été marquée par une intense chaleur.  Nous perdons aujourd'hui quelques degrés et c'est tant mieux, d'autant que nous allons bénéficier de chemins généralement bien ombragées sur ce bord de Marne que nous allons découvrir au niveau des Îles  de Créteil qui s'allongent entre le cours principal de la rivière et le coquet Bras du Chapitre, bucolique à souhait. En route donc pour cette balade de huit kilomètres d'île en île et de passerelle en passerelle.

Le Port de Bonneuil
Nous nous sommes garés Rue de l'Ouest à Bonneuil. Nous rejoignons le quai du Rancy qui longe la grande Darse de Bonneuil(Voir l'article consacré au mot "Darse"dans la rubrique "On en parle".) C'est un paysage portuaire et industriel plutôt hostile et on est encore loin d’imaginer l'ampleur du contraste paysager qui nous attend à quelques centaines de mètres. 
Les deux darses du  Port de Bonneuil.

Le port de Bonneuil a plus d'un siècle. On acheva sa construction dès octobre 1916 et fut immédiatement opérationnel. 
En pleine guerre 14-18
, il s’agissait bien sûr d’approvisionner les tranchées. À l’intérieur de la ceinture des forts, très peu éloigné de la zone de front des armées sur la Marne, le site répondait aux critères indispensables. En 1918, quelques 800 mille tonnes de matériel militaire et de charbon transitent ainsi par le port de Bonneuil. Les chargements arrivent des ports du Havre et de Rouen et poursuivent leur route vers l’Est en train. L’armistice mit fin à cette activité. La ville de Bonneuil, alors peuplée de moins de 800 habitants, n’a guère les moyens d’acquérir le port. C’est donc VNF (Voies navigables de France) qui en prend la gestion, Les travaux d’achèvement du port reprennent à la fin des années vingt. 


La darse sud est achevée au début des années 1930. Les premières entreprises se sont implantées dès les années 20. 
Nous dépassons les grilles de l'entreprise Colas. Arivée dans les années 1930, elle est la plus vieille entreprise encore présente aujourd’hui sur la zone portuaire. C’est le développement économique du port qui a permis le développement de Bonneuil-sur-Marne. Aujourd’hui, le port de Bonneuil, désormais propriété de Ports de Paris Haropa est le deuxième port fluvial d’Ile-de-France après Gennevilliers. Avec ses 186 hectares et plus de 150 entreprises, il accueille un trafic de marchandises par voie d’eau de 1,2 millions de tonnes et génère plus de 2000 emplois directs.


Le Bras du Chapitre.

Photo J. Fillis
Nous déambulons ainsi jusqu'à l'extrémité nord-ouest du Quai du Raincy. Après avoir dépassé les installations du club nautique, nous allons découvrir une petite ruelle ombragée à la végétation luxuriante qui longe un étroit bras de la Marne tout à fait charmant. C'est le Bras du Chapitre. Difficile aussi d'imaginer qu'autrefois, trois moulins (le moulin vieux ; le moulin neuf ; le moulin d’en-haut) étaient établis sur ce petit cours d'eau qui traversait, alors, une dynamique zone artisanale importante pour Créteil.  Un panneau nous indique que la maison devant laquelle nous passons était, au début du XXe siècle, une guinguette appelée "l'Arche de Noé". En effet, à l'époque,  on venait joyeusement faire la fête à cet endroit. Pas moins de quatorze guinguettes s’égayaient tout au long du Bras du Chapitre. Toutes sont devenues, aujourd'hui, des maisons particulières.
De tout ce passé tonitruant, ne subsiste aujourd'hui que cette étroite ruelle qui longe le Bras du Chapitre dans une parfaite quiétude. 


Les chanoines du Chapitre de Notre Dame de Paris furent propriétaires de l'endroit à partir de 980 et jusqu’au XVIème siècle, d'où le nom 'Chapitre' donné à ce petit bras de Marne.
Nous poursuivons sur la berge du Bras du Chapitre, marquons une pause  pour prendre la pose devant la caméra de Jacques et découvrons un petit square installé ici depuis la fin du XIXème siècle. Il accueille un joli kiosque à musique très semblable à ceux en vogue en ce XIXème siècle si inspiré. En fait, celui-ci a été réalisé en 1989 par les apprentis charpentiers du lycée technique François-Mansart de Saint-Maur. Beau travail, vraiment ! Le nom donné à ce square, 'Daniel Jullien', est celui d'un grand résistant, natif de Créteil, mort en déportation pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Un peu plus loin, nous passons devant ce qui fut autrefois l'auberge du Petit Cochon de Lait.  Le Petit Cochon de lait détient le record d’ancienneté et de durée : 1896-1999. Un concours de natation était organisé, chaque été sur près de 2 km, entre 'Le Petit Cochon de Lait' et 'L’Arche de Noé'.


Photo JPL

Le Bras du Chapitre, impropre à la navigation fluviale, comptait en 1869, outre le bateau à lessive de M. Bellier, un bateau-lavoir dépendant du Moulin Vieux. Dans les registres municipaux du XIXème siècle, sont mentionnées des plaintes véhémentes portées contre les lavandières : « La commission a remarqué que la descente des chevaux était encombrée par des blanchisseuses et que la promenade à la suite servait à étendre le linge. Il est impossible que cet état de chose continue, les chevaux ne pouvant descendre dans cet abreuvoir dont les eaux sont troublées et gâtées par le savon et les produits chimiques. »


Ces lavandières locales, tant décriées par les marchands, ont cependant inspiré Victor Hugo qui, en 1859, résida un court moment dans l'auberge du Petit Cochon de Lait où il écrivit ces quelques vers :

Photo J. Fillis

Sachez qu’hier, de ma lucarne,
J’ai vu, j’ai couvert de clins d’yeux
Une fille qui dans la Marne
Lavait des torchons radieux.

 Près d’un vieux pont, dans les saulées,
Elle lavait, allait, venait ;
L’aube et la brise étaient mêlées
À la grâce de son bonnet.

Je la voyais de loin. Sa mante
L’entourait de plis palpitants.
Aux folles broussailles qu’augmente
L’intempérance du printemps,

Aux buissons que le vent soulève,
Que juin et mai, frais barbouilleurs,
Foulant la cuve de la sève,
Couvrent d’une écume de fleurs,

 Aux sureaux pleins de mouches sombres,
Aux genêts du bord, tous divers
Aux joncs échevelant leurs ombres
Dans la lumière des flots verts,

Elle accrochait des loques blanches,
Je ne sais quels haillons charmants
Qui me jetaient, parmi les branches,
De profonds éblouissements.
 

Nous poursuivons le long du Bras du Chapitre sur un chemin devenu plus étroit. Le chemin, bordé d'arbres imposants - frênes, platanes et érables géants, se termine par un petit escalier que nous empruntons pour nous retrouver brutalement sur les quatre voies du trafic intense entre l'église de Créteil et le Pont de Créteil. Nous les traversons au plus vite et poursuivons sur la Rue du Port. Une petite passerelle permet de traverser le Bras du Chapitre à son extrémité nord juste avant qu'il ne conflue avec la Marne. Nous pénétrons ainsi sur le territoire des quatre Îles de Créteil qui s'étendent entre la rive gauche de la Marne et la rive droite du Bras du Chapitre.

Les Îles de Créteil.
Photo D. Armanini (juillet 2021)


Nous entrons donc dans l'île Brise-Pain et ses petits jardins familiaux particulièrement soignés. Nous passons maintenant sous la lourde structure du pont de Créteil et marquons un arrêt près de l'écluse de Créteil. Une clôture empêche l'accès à ces importantes installations fluviales. En effet, à la hauteur du barrage de Créteil, l'écluse permet le passage vers le Port de Bonneuil de très grosses péniches de plus de 120 mètres de long et de plus de 11 mètres de large avec un tirant d'eau supérieur à trois mètres. Ces péniches peuvent chacune transporter jusqu'à 1600 tonnes de fret. Le trafic fluvial desservi par cette écluse est exclusivement celui lié à l'activité du Port de Bonneuil puisqu'au delà de l'entrée dans les darses de ce port, la Marne est interdite aux lourdes embarcations jusqu'à Joinville-le-Pont. Nous poursuivons vers le sud et passons devant la piscine Sainte Catherine


Photo J. Fillis

Cette piscine, désormais fermée au public, est réservée aux scolaires et aux associations. 

Nous nous ménageons un petit détour sur notre droite pour découvrir la petite passerelle sur la Guyère. La Guyère est un petit chenal qui délimite avec le Bras du chapitre, la petite île de la Guyère magnifiquement fleurie.
Nous voici de retour à la hauteur de la piscine et nous découvrons un peu plus loin vers le sud, le Domaine Sainte Catherine installé sur le bord de la rivière. C'est la dernière des guinguettes de cette partie du cours de la Marne. Établi en 1956 sur l’île Brise-Pain, le domaine assure toujours un service de restauration, mais il ne possède plus le titre (protégé) de guinguette. Nous traversons maintenant la Guyère sur une autre petite passerelle pour passer dans l'île Sainte Catherine. C'est la plus grande des quatre îles de Créteil. Pendant longtemps, les îles de la Marne ont été cultivées, abritant un habitat modeste, des fermes et des potagers. 

Photo J. Fillis
Aujourd’hui, on y trouve surtout de superbes propriétés, qui profitent d’un cadre de vie hors du commun, un havre de paix à deux pas de la capitale. Les petites rues très calmes y respirent la douceur de vivre. Cependant, cette quiétude a un prix ; les habitants sont obligés de construire leur maison sur pilotis car en cas de crue de la Marne, l’eau peut monter de manière incontrôlable. Il fut même question de classer ces îles en zone rouge inconstructible… Ce projet funeste a fort heureusement été suspendu. Nous prenons à gauche vers la Passerelle de la Pie. Cette longue passerelle piétonne traverse la Marne et permet de rejoindre le quartier de la Pie à Saint-Maur-des-Fossés. Nous nous attardons sur cette passerelle surplombant la Marne pour observer le paysage. On voit au loin, vers le sud,  la confluence de la rivière avec les darses portuaires de Bonneuil. Nous rebroussons chemin. La passerelle surplombe, ici, la minuscule île des Ravageurs.  Le parc de l’île des Ravageurs, possède une aire de jeux pour les enfants ainsi que des tables pour pique-niquer à l’ombre. Nous traversons maintenant le Bras du Chapitre par le petit pont routier qui permet l'accès des véhicules à l'île.


Nous retrouvons la Ruelle du Chapitre, et un peu plus loin le club nautique que nous contournons par un étroit chemin qui va nous conduire jusqu'à la Rue Louise puis la Ruelle du Morbras avec ses escaliers quelque peu casse-pattes.. C'est la seule difficulté du jour. La dernière marche débouche sur le large trottoir de l'Avenue de Paris (D19). Le Parc Départemental du Rancy est à quelques pas de là.

Le Parc du Rancy.
Nous entrons dans ce beau parc de sept hectares par sa porte ouest. Il est magnifiquement entretenu et connait un réel succès auprès des familles des quartiers voisins. Aménagé sur ce qui était à l’origine une partie des jardins du château du Raincy, ce parc historique descend en coteau vers la Marne et le port de Bonneuil-sur-Marne.
Photo JPL

 
Une allée de platanes, vestige de l’ancienne allée cavalière du château, traverse le parc, donnant à cet espace de promenade et de détente un aspect majestueux. Un important programme de réaménagement a également permis de restructurer les petites allées et les entrées du parc. Ses pentes boisées accueillent de nombreux équipements de détente pour les petits et grands enfants. Le petit jardin de plantes médicinales du parc est constitué de près de 150 espèces botaniques différentes et permet de découvrir des plantes peu connues, comme la 'jusquiame noire' ou le 'gant de Notre-Dame'.
Nous descendons le coteau à travers les allées du parc dont nous sortons par sa petite porte nord-ouest qui fait face au parking du Crazy Fly, où nous attendent nos véhicules. Le Crazy Fly est un espace de loisirs pour très jeunes et moins jeunes qui propose notamment des souffleries permettant des simulations de vols libres


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