mardi 26 septembre 2023

De la Canche aux Merciers à la Gorge aux Châts (Christine le 26/09/2023)

Photos du jour.
C'est un très beau mardi après-midi ensoleillé qu'a choisi Christine pour nous faire découvrir, dans le nord du secteur des Trois Pignons en Forêt de Fontainebleau, un circuit offrant des points de vue panoramiques exceptionnels sur le massif forestier et la Vallée d'Arbonne. Le parking de la Canche aux Merciers est notre point de départ, c'est aussi le point de départ du "Circuit des 25 Bosses", réputé pour être un des plus difficiles de la Forêt de Fontainebleau. Christine, consciente de nos faiblesses relatives, a opté pour un circuit certes plus aisé mais tout aussi réjouissant tant les paysages traversés provoquent l'enthousiasme. Elle nous propose ainsi  quelques dénivelés pendant cette balade  de 9 km qu'elle préfèrera finalement légèrement écourter pour ménager les organismes. Nous la remercierons pour cette prévention.
Cette rando est aussi l'occasion d'accueillir Véronique et Christian qui sont venus tester notre accueil et notre organisation.




L'aqueduc de la Vanne et du Loing
Nous nous engageons suivant les petits tracés bleus du sentier Denecourt/Colinet n°16 et ne tardons pas à rencontrer une arche de l'Aqueduc  sous laquelle nous passons pour ensuite longer l'énorme structure sur quelques centaines de mètres. Sur ces imposantes arcades s'écoulent les eaux pures de deux aqueducs : celui de la Vanne et celui du Loing.
Ils ont été conçus  en 1858 par l'ingénieur Eugène Belgrand à la demande du Baron Haussmann pour approvisionner Paris en eau potable par un réseau de quatre aqueducs acheminant les eaux des sources de l'Avre en Normandie ; de la Dhuis en Picardie ; du Loing au sud de l'Île-de-France et de la Vanne en Bourgogne.

Le parcours de l’aqueduc de la Vanne jusqu'à Paris s'effectue pour une grande partie dans des tranchées couvertes ou dans des conduites souterraines, mais aussi sur de nombreux ponts-siphons ou ponts-aqueducs.
L'aqueduc du Loing a un parcours principalement souterrain jusqu'à la station de relevage de Sorques qui permet de relever les eaux de l'aqueduc à la cote 92 m, au niveau de celles de l'aqueduc de la Vanne qu'il rejoint ensuite dans la forêt de Fontainebleau, dans le centre de traitement et de relance de Fontainebleau situé au niveau du quartier de la Croix-du-Grand-Maître.

Télégraphe de Noisy-sur-École.

Nous poursuivons sur le sentier 16 au pied du "Télégraphe" que nous n'apercevrons pas sur les hauteurs puisqu'il n'en  subsiste qu'une ruine sur un plan carré de 4x4 m, sur laquelle était bâtie une tour en moellons dont le mur méridional n'a plus qu'un mètre alors qu'à l'origine la tour avait 9 m de hauteur. 
Le télégraphe Chappe (ou télégraphe aérien) était un moyen de communication visuel par sémaphore, sur des distances de plusieurs centaines de kilomètres, mis au point par Claude Chappe en 1794. Les sémaphores sont en général placés sur des tours dites tours Chappe.
🔰 Une tour Chappe était constituée :
  • du signal (mât muni d'un régulateur pivotant et de deux indicateurs articulés)
  • d'une salle de travail à l'étage où le stationnaire observait les tours voisines et actionnait le système de manœuvre du signal
  • d'un local de repos en dessous, où le stationnaire pouvait descendre se reposer un quart d'heure après le coucher du soleil à un quart d'heure avant le lever du soleil.
Le poste d’Arbonne se situe entre celui de Fleury (à 6,5 km) et celui de la Chapelle la Reine.  Il cessera ses activités vers 1850, remplacé par le système du télégraphe électrique, plus rapide et plus pratique.

À propos de Claude François Denecourt (1788-1875) :
🔰Claude François Denecourt, concepteur des sentiers bleus de la forêt de Fontainebleau, a consacré l'essentiel de sa vie à faire connaître et contribuer à créer, souvent de toutes pièces, les richesses de la forêt de Fontainebleau. Combattant de l'Armée napoléonienne, il est nommé concierge d’une caserne de Fontainebleau en 1832, avant d’être révoqué en raison de ses idées républicaines. À 44 ans, il découvre les beaux paysages de la forêt qui lui apportent beaucoup de réconfort. Il décide alors de consacrer tout son temps et une partie de ses économies à faire connaître ce lieu aux touristes. Autodidacte, il publie ses premiers guides très rapidement : les guides Denecourt. Chaque édition était accompagnée d’une carte réalisée selon ses instructions. La carte permettait de repérer les différentes visites proposées dans le guide. C’est son approche pratique et concrète de la visite en forêt qui fit le succès considérable des "guides Denecourt".
 À partir de 1842, Denecourt ne se contente pas d’indiquer les promenades, mais il commence à tracer lui-même les chemins en forêt, souvent avec l’aide des carriers et autres tailleurs de pavés. À sa mort, 150 km de sentiers sont ainsi tracés et balisés au moyen de flèches bleues. Il fit également aménager des fontaines, des grottes et édifier la tour qui porte aujourd'hui son nom. Il baptisa enfin les lieux les plus remarquables : 600 arbres, 700 rochers, sites et points de vue. Ces noms, souvent empruntés à la mythologie, à l’histoire ou à la littérature, étaient l’occasion pour lui de raconter les légendes liées au lieu – légendes que souvent il inventait lui-même.  Les plus grands écrivains (Lamartine, Hugo, Sand, Musset, Baudelaire…) lui rendirent hommage à travers un recueil de textes où il fut nommé le "Sylvain de la forêt de Fontainebleau" par Théophile Gautier. De nos jours, ces sentiers bleus sont baptisés "Denecourt/Colinet". Charles Colinet (1839-1905), son disciple, fut l'infatigable continuateur de l’œuvre du maître. Claude François Denecourt est considéré comme un des pionniers de la randonnée pédestre et des chemins de randonnée modernes.


Quelques indésirables parmi les fougères et les bruyères.
Nous  cheminons sur le sentier qui s'allonge au pied de la platière du "Laris qui Parle". Mon attention est attirée par des tiges rouges caractéristiques qui contrastent sur la trame verte des fougères. C'est la Phytolacca Americana, une plante invasive aussi appelée 'Raisin d'Amérique', 'Teinturier',  'Épinard de Cayenne', 'Épinard des Indes'. Ces doux noms sont trompeurs. La Phytolacca est toxique des feuilles jusqu’aux racines, en passant par les fruits ! La sève du phytolaque contient des toxines qui tuent la microfaune et flore dans le sol. Elle peut tuer un mouton ou une biche qui aurait absorbé 300 g de feuilles et de tiges fraiches. La plante capte la plus grande partie de l’eau de pluie tombée autour d'elle, affaiblissant plus encore les semis et les essences locales.
L’Association ASABEPI, s’est engagée dans la lutte contre ces invasions.  Les chantiers d'arrachage se réalisent toute l’année quand la météo le permet. Mais ils se déroulent surtout au printemps afin d’intervenir sur les plantes avant leurs fructifications, pour éviter toute propagation des graines.

La platière du "Laris qui Parle".


Le sentier s'élève rapidement maintenant. Il se glisse entre les rochers qui nous offrent le spectacle de leurs formes diverses parfois extravagantes. Nous nous faufilons, arpentons le chaos rocheux et parvenons ainsi sur la vaste platière du "Laris qui Parle". Ce nom énigmatique a été donné à ce paysage remarquable de bruyères et de callunes s'accrochant sur les grès affleurants. Sans doute parce que ce paysage minéral nous 'parle' de l'histoire géologique des lieux. Qui veut bien prêter l'oreille pourra entendre, dans la petite brise, un message résumant  les innombrables millénaires de cette  minéralité et qui conte :
  • le sable : très riche en silice dont on imagine mal que la couche peut atteindre plus de 60 mètres d'épaisseur,
  • la platière cet effleurement gréseux qui s'est constitué après un très long processus physico-chimique de silicification de la couche supérieure des sables,
  • Le chaos qui résulte de l'effondrement de la platière,
  • les rochers de grès aux formes diverses qui font la réputation de ces forêts en même temps que le bonheur des fans d'escalade.
C'est un véritable privilège d'avoir, à nos portes, des paysages si riches d'enseignement.
Le Denecourt/Colinet n°16 est communément appelé le sentier des Belvédères, sans doute parce qu'il offre de nombreux points de vue parfois vers le nord sur des vallées profondes (nous sommes ici à plus de 120 mètres d'altitude), parfois vers le sud sur le massif des Trois Pignons où serpente le difficile "parcours athlétique des 25 bosses". Nous ne boudons pas notre plaisir et marquons des arrêts contemplatifs pour profiter pleinement de ces points de vue magiques sur la Forêt.




Retour vers le Parking de la Canche.
🔰 Nous redescendons vers la vallée. La descente est relativement raide et mal aisée tant les multiples racines affleurantes sur le sentier tentent de s'opposer à notre progression.
🔰 Dans ce labyrinthe minéral, les arbres semblent pousser à même les grès allongeant leurs racines sur la surface des rochers jusqu'à rencontrer la terre nourricière. Je remarque un immense rocher à la forme animale. J'y vois le profil d'une tête de dauphin ouvrant sa longue bouche. Les rochers de Fontainebleau se prêtent ainsi à l'imagination du promeneur. Chacun peut exercer sa propre interprétation et l'unanimité est rare. 
Le rocher 'la tortue', lui cependant, ne souffre pas d'autres interprétations.

Nous longeons maintenant la Gorge des Châts. Ces châts ne miaulent guère. Il sont les châtaignes fruits des châtaigniers très nombreux le long du sentier. Nous sommes fin septembre, les bogues se sont ouvertes libérant de beaux "châts" qui ne demandent qu'à être ramassés tout au long du sentier.  🔰 Nous rencontrons, à plusieurs reprises de jeunes varappeurs ayant disposé au pied des parois abruptes des matelas de mousse dense, censés amortir une éventuelle chute de leur propriétaire s'adonnant à la pratique du 'bloc'. On trouve en Forêt de Fontainebleau, d'importants spots de bloc attirant des amateurs venus de l'Europe entière voire d'autres continents. Les spécialistes parlent du 'Bloc à Bleau' (Bleau  désignant Fontainebleau par aphérèse). 
Ce chemin de la Gorge aux Châts ne présente lui aucune difficulté. C'est une large allée sableuse traversant la châtaigneraie  qui va ainsi nous ramener tranquillement au parking de la Canche aux Merciers où nous allons nous séparer non sans avoir pris le temps de  chaleureusement remercier Christine pour l'organisation  de cette belle rando au cœur de ce qui est considéré  à juste titre  comme un des plus beaux massifs forestiers d'Europe.



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