samedi 14 juin 2025

Épernay (Didier le 14/06/2025)

Photos du jour.


C'est sous un ciel chargé que notre sympathique chauffeur, Éric, nous attend au volant de son imposant car au beau lustre noir qui ajoute une authentique classe au véhicule. C'est ce même Éric au volant de ce même car qui nous avait conduit à Royaumont et à Troyes les années précédentes. La douceur de sa conduite nous avait enchantés et c'est grâce à la demande insistante de Didier que nous avons le plaisir de pouvoir profiter de son professionnalisme aujourd'hui encore.

Les nuages et les prévisions peu optimistes de la météo n'ont guère découragé les 25 personnes de notre groupe bien décidées à profiter de l'accueil promis sur ces terres de Champagne
Nous voilà donc tous embarqués direction l'autoroute A4 pour parcourir les 145km qui séparent Varennes-Jarcy du Mont Bernon à Éperrnay.



Marie a, comme à l'accoutumée, soigneusement préparé la petite collation café/croissant que nous allons pouvoir apprécier sur une aire d'autoroute située à une cinquantaine de kilomètres de notre objectif champenois. Peu après cet arrêt vital pour le bien être de nos vessies, la pluie s'invite sur la route.

Didier
indique que le cas échéant, nous pourrions renoncer à la petite rando qu'il a prévue et reconnue à travers le vignoble et opter plutôt pour une balade en ville. Les options sont soumises au vote. Résultat : 12 pour le maintien de la rando ; 12 contre. L'exercice de la démocratie est chose souvent malaisée. 
Il est finalement décidé que nous nous rendrons au point de départ de la rando prévue où nous pourrons ainsi juger sur place de la possibilité de dérouler notre programme. Nous ne le savions pas encore mais ce fut là une excellente décision puisque, arrivés au Mont Bernon, il s'est avéré que les conditions météo étaient parfaites pour nous lancer sur les chemins à travers l'immensité des vignes. Ainsi nous ne verrons pas la moindre goutte de pluie de toute la journée ; soleil et chaleur vont, en fait, illuminer notre sortie annuelle.


(Ci contre une caricature de notre chauffeur. Elle est l'œuvre d'un de ses passagers, un américain en balade entre Amsterdam et Paris, qui, pour remercier Éric de sa prestation au volant, a réalisé cet excellent dessin.)



Le Mont Bernon.
Éric a garé son car tout près du Mont Bernon qui culmine au sud de Bernon-Village à 208 mètres d'altitude. Bernon est un quartier d'Épernay qui se situe au sud du centre ville. 


Didier nous propose un cheminement sur le coteau qui domine la vallée de la Marne. La vue s'étend sur l'immense vignoble qui s'étend sur les coteaux de cette vaste vallée large ici de quelques kilomètres. Ce sont les sinuosités de la Marne qui ont dessiné la vallée qui porte son nom. En scindant le plateau forestier, la rivière a créé deux coteaux presque identiques, qui se répondent comme des miroirs.


Nous sommes ici  au carrefour de plusieurs terroirs champenois prestigieux. Épernay, capitale du Champagne, est entourée de vignes comme un phare au milieu de l’océan. La ville est une porte d’entrée sur le vignoble de la Vallée de la Marne et les coteaux, sur lesquels nous randonnons maintenant, sont inscrits sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO. 
Le vignoble de  la Côte des Blancs se déploie autour de nous. Ici les vignes tirent le meilleur d’un terroir qui fait la part belle à la craie. Une toile blanche idéale pour faire grandir le cépage chardonnay dans un cadre d’exception !
Nous observons la vigne, les grappes encore loin de leur maturité présentent de minuscules bourgeons qui s'épanouiront pendant tout l'été pour former le raisin à l'origine du précieux breuvage. On remarque à la tête de ces rangs démesurés de vigne, de petits rosiers venant perturber par leur éclat l'uniformité verdoyante du vignoble. Ces rosiers de vigne n'ont pas été plantés là à des fins décoratives. Leur utilisation, probablement ancestrale, est liée à la défense des cultures et la lutte contre les ravageurs. Les rosiers sont sensibles à des souches de maladies ou d'insectes similaires ou identiques à ceux de la vigne. Leur attentive observation permet ainsi de détecter préventivement certaines attaques par des organismes ravageurs de la vigne. Dans certaines régions, ce sont  les  pêchers de vigne qui sont utilisés pour la prévention des vignobles.

Nous dominons maintenant le paysage urbain de la ville d'Épernay vers laquelle nous allons tranquillement descendre pour retrouver notre souffle après les ascensions sur les pentes parfois assez rudes du coteau. Le car bienvenu nous attend et Éric se propose de nous conduire Place Mendés France tout près du  P'tit Champenois, rue GambettaDidier a eu l'excellente idée de nous réserver une bonne table. 

Là, en plein centre-ville, nous sommes reçus sous la haute voûte d'une authentique cave champenoise. L'accueil est aussi chaleureux que le lieu, une coupe de champagne nous est servie, prélude à des agapes totalement méritées après les difficultés endurées sur les pente du vignoble. Nous engloutissons le contenu de l'assiette de charcuterie proposée en entrée. Nous portons désormais notre attention sur un suprême de volaille sauce champagne accompagnée d'une savante composition de pommes de terre en médaillon. On termine avec une brioche façon baba au rhum copieusement garnie.
Didier nous demande de ne pas faire trainer la dégustation de notre petit café car l'heure tourne et notre visite dans les établissements Mercier est assujettie à un horaire précis.

Eugène Mercier.
Éric a aisément trouvé une place pour ranger son car sur le grand parking-visiteurs des établissement Mercier. Nous pénétrons dans le vaste hall où est présenté le fleuron de la Maison, un gigantesque tonneau : le célèbre foudre Mercier qui fut, avec la Tour Eiffel, la vedette de l’Exposition universelle de Paris en 1889. Sa construction débutée en 1870 fut menée par un maître tonnelier au nom prédestiné de Jolibois.. 150 chênes furent abattus pour la réalisation de ce fût de 200.000 bouteilles, jaugé par la Régie pour 1.600 hectolitres, pesant 20 tonnes, ayant nécessité 800 pièces d’assemblage. 

Le 17 avril 1889, une équipe d’ouvriers démolit en partie les murs de l’immense cellier où repose le foudre, pour le faire sortir. Quatre énormes roues, spécialement construites par les chemins de fer de l’Est, supportent les vingt tonnes du foudre. L’ensemble est tiré par douze paires de bœufs du Morvan. Dix-huit chevaux les suivent, pour prêter main forte dans la montée des côtes les plus rudes. Le voyage jusqu'à Paris s'apparente à une épopée, On doit contourner des villages, créer des chemins, abattre des arbres, renforcer des ponts.  Pour l'arrivé à Paris, Mercier avait du se porter acquéreur de 5 immeubles au prix exorbitant afin de pouvoir les raboter pour permettre le passage du monstre. Il faudra enfin élargir l’entrée pour le faire pénétrer dans l’enceinte de l’Exposition. Eugène Mercier, génie de la communication publicitaire,  savoure sa victoire;  son foudre est en place, avec pour seule rivale la Tour Eiffel.
Nous sommes, comme les parisiens de 1889, dans un enthousiasme admiratif devant ce monument de l'esprit d'entreprise. Les deux parois plates du foudre ont été magnifiquement sculptées par un certain Gustave Navlet dont nous aurons l'occasion de voir certaines œuvres 30 mètres plus bas dans les galeries souterraines de la Maison.
On nous équipe d'un audiophone et nous passons dans une salle latérale pour suivre la projection d'un petit film sur l'histoire de cette illustre Maison et en particulier sur la vie d'Eugène Mercier son créateur.

Le talent de communiquant de cet homme est extraordinaire. Passionné par les montgolfières, Eugène Mercier avait su utiliser cette compétence pour assurer la publicité de sa maison de champagne au cours de l'exposition universelle. Il amarra un ballon captif sur le Champ de Mars chargé de bouteilles de champagne et pouvant hisser neuf personnes à  300 mètres, soit la hauteur de la Tour Eiffel. Au cours de l'ascension Mercier leur faisait déguster son champagne. Naturellement, la toile de la voilure était griffée au nom du Champagne Mercier, pour être vue du sol. Ce ballon aura finalement reçu la visite de 20 000 personnes.

Lors de l'exposition universelle, il avait repéré le potentiel de l'invention des frères Lumière. Il leur demanda de réaliser le film "De la grappe à la coupe" connu comme le premier film publicitaire de l'histoire.  Bien sûr il tenait à apparaître en personne dans le film. La technique de l'époque n'autorisait pas des prises de vue dans la pénombre. Aussi, créa t-on des studios lumineux reproduisant l'exact intérieur des caves où d'authentiques ouvriers maison furent invités à reproduire les gestes qu'ils effectuaient quotidiennement dans la pénombre des caves.

 La visite des caves Mercier.
Nous sommes maintenant devant les ascenseurs. Deux vastes cabines pouvant accueillir 25 personnes chacune permettent de rejoindre les galeries 30 mètres plus bas soit la hauteur de 10 étages.
C'est en 1871, qu'on entreprit de creuser ces caves gigantesques. Eugène Mercier avertit l'architecte : « Comptez par kilomètres, non par mètres ! ». Les caves font 18 kilomètres sur un seul niveau pour faciliter la tâche et elles communiquent avec la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg, ce qui permet d'expédier plus facilement le champagne et réduire les coûts conformément à l'objectif fondateur de Mercier :  créer une maison de Champagne qui produise un vin de qualité accessible à toutes les bourses.

Une petite surprise nous attend dans l'ascenseur : la projection d'une vidéo très graphique sur une paroi de la cabine. La succession verticale panoramique des images iconiques de la Maison accentue l'impression de descente et prépare à la visite des lieux. Notre guide nous invite à prendre place dans les wagonnets d'un petit train sur pneus,  guidé au laser. Nous portons les audiophones à nos oreilles, la visite commence.  Ce projet de galeries  était démesuré pour l'époque.  Leur construction durera six ans. Leur inauguration fut très médiatisée. Lors de leur ouverture, des calèches tirées par des chevaux blancs furent utilisées pour la visite. Mercier y fit installer des appareils électriques, avant-gardistes pour l'époque, ainsi qu'une machine à vapeur pour les éclairer.
En 1891, le président Sadi Carnot viendra les visiter à son tour avec un attelage identique : 100 000 bougies seront allumées à cette occasion.
 En 1950, les successeurs d'Eugène Mercier, animés du même sens de la publicité organisent un rallye automobile dans ces caves pour le lancement de la 4 CV.

Nous nous laissons convoyer dans ce décor insolite, impressionnés par la hauteur des galeries et par l'immensité du réseau qui les articule. Une salle présente des 🔰statues d'ouvriers qui, pioche à la main et lampe au casque,  attaquèrent  la roche de la crayère pour l'extraire par milliers de tonnes. On imagine le travail de titan qui fut réalisé en ces lieux.

Des alignements de bouteilles se succèdent témoins de l'ampleur de la production Mercier. En 1900, 15 millions de bouteilles sont stockées dans les caves pour une production annuelle d'environ 4 millions de bouteilles ce qui en fit la plus importante maison à cette époque.
Une salle protégée par de lourdes grilles abrite l'Œnothèque Mercier. Là sont stockées les bouteilles conservées des crus historiques de la Maison, un véritable musée du champagne.

On peut admirer par ci par là de splendides bas-reliefs du sculpteur Gustave Navlet et en particulier dans la "galerie Pékin" où il se succèdent. Ils sont dédiés soit aux principales villes de Champagne soit à des scènes allégoriques sur le thème de la vigne, des vendanges ou du vin, ou encore sur celui des différentes étapes de la vinification. (Le nom Pékin donné à cette magnifique galerie vient du nom "Château de Pékin" que Mercier avait donné à sa demeure de la Rue de Champagne. Il avait donné ce nom en hommage aux troupes de Napoléon III entrées victorieusement à Pékin en septembre 1860.)
On doit à  un autre sculpteur, René de Saint-Marceaux  la belle 🔰statue de femme peu habillée brandissant une coupe de champagne. L'audiophone nous apprend que cette statue avait choquée par sa quasi nudité le public de l'Exposition universelle. Aussi Mercier l'avait fait revenir d'urgence dans ses caves à l'abri des regards courroucés.

La méthode champenoise.
On la doit au moine bénédictin Dom Pérignon contemporain de Louis XIV. Il se serait inspiré de la méthode de "prise de mousse" pratiquée à Limoux. Son apport à la méthode a été d'assortir avant de les presser des raisins de divers cépages.

La principale caractéristique du champagne réside dans l'étape de la seconde fermentation qui se produit en bouteille après la fermentation primaire. Le vin assemblé est mis en bouteille avec de la levure et une petite quantité de sucre, appelée 'liqueur de tirage' et arrêté avec une capsule ou un autre bouchon temporaire. On utilise alors des bouteilles plus robustes pour contenir l'effervescence sans exploser. 

Stocké horizontalement dans une cave à vin,  le champagne doit vieillir quinze mois pour se développer complètement. Les années où la vendange est exceptionnelle, un millésime est déclaré et le vin doit mûrir pendant au moins trois ans. Les meilleurs producteurs dépassent l'exigence, en tenant les bouteilles sur lies pendant six à huit ans.

Après l'élevage, les lies doivent être consolidées en vue de leur élimination. Les bouteilles subissent un processus appelé remuage.  Les bouteilles sont placées sur des supports spéciaux appelés pupitres qui les maintiennent à un angle de 35°, avec la capsule pointée vers le bas. Tous les deux jours, les bouteilles sont légèrement secouées et tournées, alternativement à droite puis à gauche, puis replongées dans les pupitres, l'angle augmentant progressivement.
 Le remuage manuel est toujours fait pour les cuvées Prestige en champagne, mais il a été par ailleurs largement abandonné en raison des coûts élevés de main-d'œuvre. Un équipement de criblage mécanisé (une gyropalette) est utilisé à la place. Après huit à dix semaines, la bouteille est verticale, la lie est installée dans le goulot. Le processus d'enlèvement des lies est appelé dégorgement. Il fut inventée en 1816 par Madame Clicquot (veuve Clicquot), et permettait que la capsule et la lie soient retirées sans perdre une grande partie du liquide. Avant cette invention, le champagne était trouble. Le dégorgement automatisé moderne se fait en congelant une petite quantité de liquide dans le col et en retirant ce bouchon de glace contenant la lie.
Vient ensuite l'étape du dosage : on complète le niveau de liquide par de la liqueur d'expédition qui est un  mélange de vin de base et de saccharose. Ce dosage va définir le type de champagne produit de "doux" à "brut" suivant le niveau de sucre ajouté.   La dernière étape consiste à insérer le bouchon maintenu par une capsule et une cage métallique, le muselet.

L'Avenue de Champagne.


Nous nous acheminons maintenant vers les incontournables salles de dégustation présentant les cinq cuvées de la marque ; Brut, Brut Rosé, Demi-sec, Brut de réserve et Blanc de Noirs. On nous propose un excellent champagne dans une jolie flûte gravée "Mercier". On apprend que tous les champagnes Mercier sont issus de  "blanc de noirs." Le blanc de noirs est un vin blanc produit avec des raisins rouges ou noirs, à jus blanc. Les champagnes utilisent cette dénomination pour les vins issus exclusivement des cépages "pinot noir" ou "pinot meunier" ou les deux en assemblage. Ils sont caractérisés par la force du premier et/ou le fruité du second.
Reste à passer à la caisse pour ceux d'entre-nous qui ont choisi de rapporter quelques bouteilles du précieux breuvage. 


Didier indique que l'heure n'étant pas trop avancée, il nous est possible de terminer la journée par une remontée  de la fameuse "Avenue de Champagne", soit une balade sous un franc soleil d'à peine un kilomètre. 
Nous voilà donc engagés sur le large trottoir nord de cette prestigieuse artère inscrite sur la liste du Patrimoine mondial, au titre des Coteaux, maisons et caves de Champagne, et qui constitue un lieu important pour le tourisme et les manifestations locales.

En1849, le premier tronçon de la ligne de chemin de fer de Paris à Strasbourg, faisant étape à Épernay, est inauguré par Louis-Napoléon Bonaparte. Les voies sont situées juste en dessous du faubourg.  Le faubourg va ainsi continuer son développement, en exportant son vin de champagne plus rapidement et en plus grande sécurité.

L'Avenue est sans doute l’une des avenues les plus riches du monde. Elle camoufle sous ses pavés un trésor. Plusieurs mètres sous terre, 200 millions de bouteilles sont entreposées. En tout, ce sont 110 kilomètres de cave à champagne qui sillonnent les sous-sols d’Épernay. 
En février 1925, le conseil municipal d'Épernay décide de donner à ce qui était la 'rue du Commerce' le nom d’Avenue de Champagne.

Le patrimoine architectural de l’avenue se compose presque exclusivement d’édifices construits pour des maisons de champagne. À l’époque, leurs bâtiments devaient répondre à trois fonctions : résidentielle, industrielle et commerciale. Jean-Rémy Moët, petit fils de Claude Moët fondateur de "Moët et Chandon", se posa en précurseur en faisant construire sa propre demeure, l’Hôtel Moët, dès les années 1850. Cet aspect résidentiel donna à l’avenue ses nombreux hôtels particuliers. Dans certains cas, en plus des dirigeants des maisons de champagne, le chef de cave habitait dans les bâtiments du faubourg. L’architecture des hôtels particuliers correspond également à une volonté de promouvoir la maison de champagne et le champagne en général. 

Si l'avenue est un haut lieu du patrimoine champenois, elle est aussi un lieu festif où sont proposés des évènements de haute qualité.  Aux beaux jours, par exemple, la voie mythique prend une dimension encore plus pétillante grâce à de nombreuses animations comme la Soirée Blanche le 14 juillet. C'est un piquenique-concert géant où tous les participants s'habillent en blanc. Le champagne y est à l’honneur, bien-sûr. En décembre,  on ne manquera pas les "Habits de Lumière", un week-end durant lequel l’avenue vibre d’un spectacle inoubliable, entre son et lumière, grande parade, feu d’artifice et dégustations inédites. 

Didier a pris quelques photos en remontant l'avenue. Cliquez sur ces miniatures pour les agrandir :
Hôtel de Billy Hôtel Gallice Château Perrier Hôtel Chandon et Trianon
Moët et Chandon Maison Boizel Moët et Chandon Maison Perrier-Jouët



Éric, avec son éternelle bonne humeur,  nous attend au volant de son car tout en haut de l'Avenue de Champagne au niveau du Parc de l'Hôtel de Ville. Nous embarquons direction Varennes-Jarcy. Nous observons le paysage champenois défiler sous nos yeux. Arrivés au niveau de Châtillon-sur-Marne, alors que nous roulons sur la D1, on peut observer s'élevant sur la crète du coteau, dominant la Vallée des Vignes, une haute statue sur un imposant piédestal. Pascale nous renseigne : "Il s'agit de la statue du Pape Urbain II". En effet, ce Pape de son vrai nom Odon de Lagery, est né en Champagne, à Châtillon-sur-Marne, vers 1042. Moine bénédictin devenu pape en 1088, il est principalement connu pour avoir prêché la première croisade lors du Concile de Clermont en 1095, appelant les chevaliers chrétiens à reprendre la Terre Sainte. Champenois de cœur, il  obtînt le privilège exclusif de sacrer les rois de France à la cathédrale de Reims. La statue monumentale a été conçue en 1887 par le sculpteur français Prosper d’Épinay. Le Pape Urbain II y est représenté en tenue pontificale, la main levée, bénissant la vallée.
Nous poursuivons sur le chemin du retour. La conduite tout en douceur de notre chauffeur a peu à peu raison des plus fermes volontés de résister à l'ensommeillement. 
Tout le monde sera cependant parfaitement éveillé quand nous approcherons du parking du gymnase où nous allons nous séparer après avoir adresser chaleureusement un grand merci à Didier pour la parfaite organisation de cette si intéressante sortie annuelle.


Le vignoble de Champagne touché par le triste flot d'une actualité désolante.
Lors de nos conversations pendant le voyage, on n'a malheureusement pas pu éviter d'évoquer ces deux  lamentables faits-divers touchant à l'actualité du prestigieux vignoble de Champagne. 
Ces tristes affaires résonnent comme une antithèse radicale à ce que nous avons ressenti sur place, à Épernay, où l'activité est fondée sur la sacralisation du travail bien fait et la recherche constante de la perfection. 

Le premier de ces affligeants faits divers concerne le procès de Didier Chopin et sa femme Karine Chopin qui ont finalement avoué avoir fabriqué plusieurs centaines de  milliers de bouteilles de faux champagne vendues au prix du vrai champagne.  "À partir d'octobre 2022, j'ai fait du faux champagne", indique Didier Chopin devant le tribunal. Il estime "avoir produit entre 500 000 et 600 000 bouteilles de faux champagne".  Cependant Diane De Valbray, avocate du Comité Champagne, trouve ce nombre sous-estimé ; elle assure : "L'organisation de la fraude a été tellement sciemment et finement menée qu'il est aujourd'hui impossible de quantifier précisément le nombre de fausses bouteilles de champagne fabriquées et vendues".

L'autre fait-divers, immonde,  concerne un procès pour traite d’êtres humains en Champagne, procès actuellement en cours. Des peines de prison ferme viennent d'être requises, pour traite d’être humains, contre une gérante d’une société de prestations viticoles et deux autres recruteurs de vendangeurs en Champagne. En septembre 2023, l’inspection du travail avait procédé à un contrôle de l’hébergement mis à disposition des vendangeurs par la coopérative Anavim à Nesle-le-Repons, au sud-ouest de Reims. Les inspecteurs avaient alors constaté, pour une cinquantaine de vendangeurs souvent sans-papiers, des conditions de vie et de travail portant « gravement atteinte » à leur sécurité, leur santé et leur dignité.
Outre la traite d’êtres humains, la gérante était jugée pour travail dissimulé, emploi d’étrangers sans autorisation de travail salarié, soumission de personnes vulnérables à des conditions d’hébergement indignes, avec une rétribution inexistante ou insuffisante.
Quelque chose de bon semble cependant émerger de cette boue infâme car  pour la première fois dans un procès sur la question des vendangeurs, le Comité Champagne, qui représente 16 200 vignerons, 130 coopératives et 370 maisons de Champagne, s'est porté partie civile.
« Tout le monde s’est mobilisé pour que ces faits cessent », a assuré son avocate, Diane de Valbray, affirmant que l’organisation interprofessionnelle se plaçait résolument du côté des victimes.

Gentilé
Épernay : 22 022 habitants
Sparnaciens / Sparnaciennes