mardi 27 avril 2021

Maincy (Jacques le 27/04/2021)

Photo D. Armanini


Photos du jour.
Jacques ne pouvant accompagner cette belle rando de 9,5 km qu'il a conçue, reconnue et programmée, c'est Didier qui se charge de la conduire sous un ciel azuréen que même le plus insignifiant nuage n'ose perturber.

Maincy,  le village de Nicolas Fouquet
Vaux le Vicomte ( Licence Pixabay)

Nous nous sommes garés sur la petite place des Fourneaux qui occupe le centre de ce charmant village aux maisons de pierre qui s'étage sur le coteau de la rive gauche de l'Almont
C'est sur le territoire de Maincy que se trouve le domaine du château de Vaux-le-Vicomte, le prestigieux château de Nicolas Fouquet, le grand argentier du royaume. Et même si le bourg  est beaucoup plus ancien, l'histoire de Maincy se confond avec celle du Super Intendant et de son remarquable château. Le village a ainsi conservé une structure caractéristique avec son habitat organisé autour de courées regroupant les ouvriers et employés au château par familles et corps de métiers. Fouquet avait grand besoin en effet d'une main d'œuvre nombreuse pour bâtir ce château sur le territoire du village de Vaux qu'il fit entièrement raser avec son vieux château qui venait pourtant d'être restauré, ainsi que sa petite  église et deux de ses hameaux. Maincy dut alors accueillir et loger la population du petit village détruit. L'église Saint Étienne fut agrandie et remaniée pour compenser la disparition de celle de Vaux et toute l'organisation sociale du village fut transformée pour satisfaire aux impératifs de la tâche immense que représentait localement la construction du domaine. 
Les travaux dureront de 1656 à 1661.
L'exécution des travaux est confiée à l'entreprise Villédo, sous la direction de l'architecte Le Vau (nom prédestiné pour œuvrer sur le territoire de Vaux). Le Nôtre, réalise les aménagements extérieurs, bassins, ornements, statues, allées parterres et grand canal. Le 17 août 1661, la fête d'inauguration à Vaux étale la démesure de l'inextinguible ambition du surintendant Fouquet. La fête est somptueuse, avec jets d'eau, feux d'artifice, buffet de prestige donné pour plus de mille couverts et supervisé par François Vatel. Molière est mandaté pour créer une comédie inédite pour l’évènement : "les Fâcheux",  une comédie-Ballet où, entre les actes, sont introduits des intermèdes musicaux. Finalement et paradoxalement, c'est cette fête spectaculaire et cette magnifiscence sans égal qui entraîneront les soupçons du Roi, les enquêtes et la disgrâce de Fouquet. (C'est aussi depuis cette édifiante affaire du péculat de Fouquet, que tous les fonctionnaires ayant statut d'agent comptable public doivent prêter serment et s'engager à réparer toute faute sur leurs propres deniers).
Photo JPL
À notre retour, vers le village nous passerons devant la maison des Carmes. La manufacture de tapisserie dirigée par Charles Lebrun qui y était alors installée était chargée de pourvoir le Château de Vaux en luxueuses tapisseries fines. Environ 300 ouvriers  avec 19 maîtres lissiers flamands  y produisaient leur art.  Après la disgrâce de Fouquet, les ateliers, les matériaux, les métiers de haute lisse et la main d’œuvre  furent transférés, sur ordre de  Louis XIV, aux Gobelins dans la capitale. C'est donc grâce à Nicolas Fouquet et à son perfectionnisme immodéré que l'on doit, d'une certaine manière, la création de la célébrissime Tapisserie des Gobelins. J'ai beaucoup fait état ici du côté obscur de la personnalité de Nicolas Fouquet. Ses admirateurs feront remarquer, à juste titre, qu'il fut notamment un des plus grands mécènes de l'art. Il est le grand ami de La Fontaine qui séjournera au château de Vaux. Il s'intéresse à Molière et Corneille qu'il pensionne généreusement. Il est le protecteur du peintre Nicolas Poussin.  Il écrit lui-même poèmes et chansons. À Vaux, son salon réunit les Précieux, membres de la Préciosité, cet important mouvement littéraire du XVIIéme siècle cherchant à raffiner les mœurs et la langue française.


Nous nous dirigeons plein sud pour atteindre la limite du village que nous allons contourner par l'est pour rejoindre le "Chemin des Mécontents". Nous poursuivons vers l'est sur le chemin des Goudrays . Nous pouvons apercevoir au loin l'immense silhouette du nouvel incinérateur de Vaux le Pénil.

Un procès historique en matière d’incinération des déchets.
Screenshot Google Maps

Ce nouvel incinérateur remplace celui fermé en 2002 que les habitants appelaient "le barbecue". Il exhala durant des années des panaches de fumée mortelle. Tout commence en 1974 lorsque le syndicat intercommunal de groupement d’urbanisme de l’agglomération Melunaise est autorisé à construire une usine d’incinération des ordures ménagères à Vaux-le-Pénil, d’une capacité de 32 000 tonnes par an. A l’époque en France, l’incinération est en plein essor. L’usine fonctionne jusqu’à la fin des années 1990, période où les populations locales vont retrouver des poussières dans leurs jardins et sur les toits, et commencer à douter des conditions de fonctionnement de l’installation. Les analyses de fumées de l’incinérateur révèleront des taux notamment de dioxines explosant les normes dépassant de près de 2200 fois le seuil autorisé, un record mondial. Il aura fallu 15 années de procédure pour que la responsabilité de la communauté d'agglomération Melun Val de Seine (CAMVS) soit reconnue et que soit prononcée sa condamnation comme personne morale pour mise en danger de la vie d'autrui. Dans ce dossier, 165 plaignants et la commune de Maincy se sont portés parties civiles. On retiendra, le témoignage des victimes : une mère de famille qui évoquait "les rues du cancer" de Maincy avec, dans de nombreuses maisons, un, deux et parfois trois cas d’apparition d’une forme de lymphome particulièrement rare. Elle évoqua la malformation rénale d’un de ses enfants, puis le cancer récemment déclaré de son mari. Un professeur d’EPS,  frappé à 29 ans par un cancer rarissime, vint également relater son calvaire. Un père effondré de 67 ans, raconta la disparition de sa fille de 29 ans, Anaïs. Cette dernière avait été terrassée en 5 semaines par une tumeur particulièrement agressive. Cette condamnation tant attendue du pollueur, même si les indemnisations des victimes paraissent beaucoup trop faibles, est acquise et définitive, aucun pourvoi n’ayant été formé. L’affaire de l’incinérateur de Vaux-le-Pénil constitue une première historique, et un socle solide pour alimenter de futurs recours si une telle situation venait à se reproduire.
Photo JPL

Nous descendons vers l'Almont et passons devant le centre éducatif "Le Coudray" qui, ici, bénéficie d'un magnifique cadre aux confins de Maincy à la limite de Melun. Les Maisons d'Enfants à Caractère Social (MECS) sont des établissements médico-sociaux, spécialisés dans l'accueil temporaire de mineurs en difficulté. Ils fonctionnent en internat complet ou en foyer ouvert.
Le placement en MECS a notamment lieu dans les cas de violence familiale (physique, sexuelle ou psychologique), de difficultés psychologiques des parents, de problème d''alcoolisme, de toxicomanie, de graves conflits familiaux, de carences éducatives, de problèmes comportementaux de l'enfant.




Le Pont de Maincy.
Photo JPL

Nous nous dirigeons à présent vers le quartier des Trois Moulins. Il nous faut franchir l'Almont sur le petit pont de Maincy aussi appelé Pont Cézanne. En effet, ce pont marquant la limite des communes de Maincy et Melun, a été rendu célèbre par le Peintre Cézanne (1839-1906) qui peignit l'endroit alors qu’il séjournait à Melun en 1879. L’œuvre est importante car elle marque un tournant décisif dans l’expression de l’artiste qui rompt avec l’impressionnisme, elle est aujourd’hui exposée au musée d’Orsay. Notons que ce n’est qu’en 1950 qu’un professeur de dessin reconnait le lieu et intervient pour que ce tableau retrouve son vrai nom : "Pont de Maincy". L'oeuvre avait été nommée, par erreur, "Pont de Mennecy" en raison probablement de l’accent méridional de son auteur. Nous remontons la Rue des Trois Moulins. Le ru de Rubelles qui se jette dans l'Almont, est canalisé à cet endroit et coule sous la chaussée. On entend d'ailleurs très bien le bruit caractéristique de cet écoulement dans la pente forte de la rue. Nous poursuivons en direction du domaine de Vaux et passons devant ce qui était autrefois "la carrière des temps perdus" qui fut exploitée de 1953 à 1967. La pierre extraite ici, sous le nom de pierre de Maincy, servait à la construction ou la restauration de monuments.  Un panneau d’information situé au pied du front de taille y rappelle l’origine et l’histoire de la pierre de Maincy. Nous voilà maintenant devant le mur d'enceinte du château de Vaux le Vicomte que nous longeons jusqu'à l'Almont.

L'Almont.
Photo D.Armanini
L'Almont est un affluent de la Seine en rive droite. Il prend sa source sur le territoire de Rampillon à la limite de Nangis. L'Almont est un cours d'eau calme, d'une profondeur maximale de quelques décimètres selon les endroits traversés. Le parcours est sinueux, dans une vallée en partie boisée avec une orientation générale allant de l'est vers l'ouest pour rejoindre la Seine. Il porte le nom de ru de Courtenain de sa source à Fontenailles, puis ru d'Ancœur jusqu'en amont de Blandy, ru d'Ancœuil de Blandy au parc du château de Vaux-le-Vicomte dont il alimente les bassins et tout le système hydrologique, pour finalement prendre la dénomination 'Almont' jusqu'à sa confluence avec la Seine à Melun.
C'est donc le Ru d'Ancueil que nous pouvons observer ici sortir en une large cascade des bassins du château pour poursuivre son cheminement vers Melun sous le nom de "Almont". En 2016, la crue exceptionnelle de l'Almont conjuguée avec celle de la Seine provoqua des inondations et des dégâts importants dans le centre-ville de Melun.

Retour à Maincy.

Photo D.Armanini





Nous suivons le cours de l'Almont jusqu'au pont des Carriers qui permet de traverser l'Almont pour rejoindre le chemin de carrières et le centre du village. C'est une petite passerelle assez rudimentaire, très étroite, constituée de 4 longs blocs de grès couchés sur des piles de la même roche posées dans le lit de la rivière. Nous passons devant la Maison des Carmes qui abrita la Manufacture Royale de Tapisserie, puis remontons vers le lavoir en suivant l'étonnante petite "ruelle du ru".
Photo D.Armanini









Les eaux limpides du petit ru  dit "de la fontaine" ou encore "des moulins" s'écoulent vivement tout au long de l'étroite ruelle. C'est ce petit ru très discret qui procurait l'énergie nécessaire au fonctionnement de trois moulins : le moulin de la Porte, et le moulin de la Chambre, tous deux en amont de la place des Fourneaux et plus bas vers l'Almont, le moulin des Prés répertorié comme l’un des plus anciens moulins à papier de France. Nous sortons maintenant de la petite ruelle et pénétrons sur la place des Fourneaux qui s'étend le long du lavoir communal. 


Photo JPL

Construit en 1853, ce lavoir alimenté par le ru des fontaines est doté d'un toit à impluvium qui permet de récupérer les eaux de pluie. Les eaux du ru, après avoir traversé le moulin de la Porte situé en amont, sont canalisées sous la chaussée pour alimenter le bassin par un passage voûté. Le lavoir de Maincy pouvait accueillir une trentaine de lavandières.

Il est temps de regagner nos véhicules garés sut la place des Fourneaux. Un grand merci à Jacques pour nous avoir concocté cette belle rando en ces lieux chargés d'histoire et merci à Didier pour nous avoir ouvert la voie.


Carte de notre circuit :
Le plan imprimable et le fichier GPX de ce circuit sont accessibles dans l'onglet "GPX&PDF". (Mot de passe nécessaire)

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